Charcuterie standard, estampillée «sans nitrite» ou bio… difficile de traquer l’additif contesté en supermarché. Pour faire un choix éclairé, les consommateurs doivent connaître les subtilités avec lesquelles jouent les industriels.

 

Il y a deux ans, on apprenait que, comme le Père Noël, la couleur rose du jambon n’existait pas. Du moins, pas au naturel. L’enquête de Cash Investigation, une des meilleures audiences de l’histoire de l’émission présentée par Elise Lucet, révélait l’utilisation répandue du nitrite de sodium, notamment pour donner un aspect rosé à la charcuterie, alors que cet additif était soupçonné d’avoir un rôle dans le développement du cancer du côlon. L’histoire ne se limite pas au jambon, c’est tout le rayon charcuterie, en barquette et même parfois la production artisanale, qui en est saupoudré aujourd’hui encore. Y compris le bio.

Déjà, en 2015, l’OMS avait classé la charcuterie parmi les produits cancérogènes pour l’être humain. Puis l’Anses a enfoncé le clou en recommandant de ne pas en manger plus de 25 g par jour en moyenne, soit l’équivalent d’une demi-tranche. En résultent trois ans de baisse consécutive des ventes. Récemment, de nouvelles gammes ont fait leur apparition dans les rayons charcuterie des supermarchés. Côté conventionnel, Madrange, Fleury Michon, Herta, Monique Ranou et bientôt Aoste ; côté bio, Ensemble pour Biocoop et Rostain proposent du «sans sel nitrité» ou du «sans nitrite». De vraies alternatives pour les consommateurs qui en ont marre d’être pris pour des jambons ? Une aubaine marketing pour relancer un secteur en perte de vitesse et de crédibilité ? Comment faire le tri ?

Pourquoi utiliser le nitrite ?

Le nitrite, comme son semblable le nitrate et son dérivé le sel nitrité, est d’abord un conservateur. Pour la viande crue séchée (saucisson, jambon de pays…), il accélère aussi le processus de maturation. Compter trois mois au lieu de neuf pour fabriquer du jambon de Bayonne. Economies à la clé pour les industriels. Les propriétés colorantes du nitrite sont surtout utiles pour la viande cuite ou étuvée de type jambon blanc, qui a tendance à pâlir.

Les industriels rappellent à l’envi que le nitrite est surtout indispensable pour protéger le consommateur d’une bactérie redoutée : le Clostridium botulinum, responsable du botulisme, maladie potentiellement mortelle. Argument qualifié de «botulisme épouvantail» par Guillaume Coudray dans son livre Cochonneries : comment la charcuterie est devenue un poison. Il y cite l’exemple des fabricants du jambon de Parme qui ont décidé de revenir à la méthode traditionnelle en 1993, sans aucun additif, tout en maîtrisant les mauvais germes.

Quel est le lien entre nitrites et cancer ?

«Ils ne sont pas directement cancérogènes mais ils ont un effet promoteur, c’est-à-dire qu’ils accélèrent le processus», précise Fabrice Pierre, chercheur au laboratoire Toxalim de l’Inra à Toulouse. C’est lorsque les nitrites rencontrent certaines substances contenues dans la viande qu’ils deviennent dangereux. Ils génèrent des composés N-nitrosés : nitrosamines d’un côté, fer nitrosylé de l’autre. Ce dernier, né de l’interaction entre nitrites et fer présent dans la viande, est le plus redoutable. «Le plus embêtant est celui qui se forme pendant la digestion de la charcuterie», ajoute Fabrice Pierre. L’Inra et l’Institut technique du porc (IFIP) travaillent actuellement sur des solutions pour éliminer les risques de cancer liés au nitrite via un programme commun.

Quand on retire le nitrite de la charcuterie, l’effet pernicieux lié au cancer disparaît. «On l’a montré dès 2010», confirme Fabrice Pierre. Mais ce dernier s’inquiète que les produits sans nitrites, plus chers, ne soient pas accessibles aux personnes à revenus modestes, qui sont aussi de gros acheteurs de jambon cuit. Or en France, 25% des cancers du côlon sont imputables à la consommation excessive de viande rouge et de charcuterie.

Le conventionnel

Aujourd’hui, les industriels affirment être dans une démarche de réduction de la liste des additifs et de fabrication d’une charcuterie la plus «naturelle» possible. Pour le nitrite, beaucoup s’alignent sur les quantités limites admises dans le bio (deux fois inférieures à celles du conventionnel).

On récapitule

En magasin, comment détecter la présence des nitrites ?

Bio ou pas, mieux vaut se référer à la liste d’ingrédients inscrire sur la barquette. Dans les deux cas suivants, ça ne sent pas bon :

– Nitrites, nitrates, sel nitrité ou leurs petits surnoms qui vont du E249 au E252.

– Bouillon de légumes qui contient du jus de céleri ou des carottes/poireaux/acérola/blettes et des ferments.

Source: http://next.liberation.fr/food/2018/07/21/comment-choisir-une-charcuterie-vraiment-sans-nitrites_1667043

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